-Révision des collections de Saint-Prest


Découvert fortuitement par Louis-Gustave Guérineau de Boisvillette (1800-1863) au nord de Chartres, le site de Saint-Prest fut signalé publiquement le 1er septembre 1848 auprès de la Société géologique de France (1830) du fait de la présence d’ossements de grands mammifères dont l’âge est aujourd’hui considéré autour d’un million d’années. L’assemblage faunique est exceptionnel par sa variété d’espèces recensées (13 espèces au total), avec le remarquable Mammuthus meridionalis depereti, figure emblématique de la faune intermédiaire plio-pléistocène. L’association de ces mammifères découverts à Saint-Prest replace le gisement dans la biozone MNHQ 20, qui se traduit par un paysage forestier, ouvert, à proximité d’un cours d’eau comme l’atteste la présence de l’Hippopotamus amphibius antiquus.

Peu de temps après la découverte de cette carrière à ossements, des traces suspectes ont été constatées sur les restes osseux et bois de cervidés par Jules Pierre François Desnoyers (1800-1887) en 1863. Ces traces lui rappellent des marques occasionnées par un outil affuté. De même, en 1867 l’abbé Louis Bourgeois (1819-1878) y découvre des objets en pierres, qu’il considère dès lors comme une industrie lithique (pierres transformées intentionnellement par l’Homme préhistorique). Mais comment expliquer ces marques anthropiques (faites par la main de l’Homme préhistorique) il y a vraisemblablement un million d’années?

Revenons quelques années en arrière pour comprendre. Jacques Boucher de Perthes (1788-1868), directeur des douanes à Abbeville, extrait en 1844 dans les couches les plus anciennes du site de Menchecourt-lès-Abbeville des outils en silex associés à des restes de faunes éteintes. Il annonce alors publiquement que le genre Homo a coexisté avec des grands mammifères éteints comme le mammouth. Néanmoins, il faudra attendre 1859 pour que la haute antiquité de l’Homme soit acceptée auprès des communautés scientifiques et validée in situ sur les terrains de la vallée de la Somme à Amiens et à Abbeville. Voici le contexte préhistorique de la France du milieu du XIXe siècle. Les découvertes de Jules Desnoyers et de l’abbé Bourgeois sont alors longuement discutées. Encore aujourd’hui, la question de la nature anthropique ou paléontologique des restes découverts à Saint-Prest reste en suspens.

Les artefacts (objets façonnés par l’Homme préhistorique) de Saint-Prest ont été progressivement dispersés dès le XIXe siècle : Ecole des mines, Musée des Beaux-arts de Chartres, Muséum national d’Histoire naturelle… nous recensons aujourd’hui près de 7 lieux de conservation différents, témoignant de la richesse du site et de l’intérêt dont il fait l’objet depuis sa découverte.

Dispersion, richesse, et controverses, tant de mots pour décrire les collections de Saint-Prest. Aujourd’hui, un programme de recherche pluridisciplinaire mené au sein de l'institution du MNHN (UMR 7194 – Histoire Naturelle de l’Homme Préhistorique) en collaboration avec OPUS (Alliance Sorbonne Universités) a été initié pour revoir l’ensemble des pièces du site de Saint-Prest, dans l’objectif de redonner une unité à cette collection dispersée en lui rendant sa cohérence et son exhaustivité et de répondre à des questions anciennes (nature du site) par des approches actuelles comme l’archéozoologie.

Vanessa Coelho - UMR 7194 - MNHN


Cliquer ici pour manipuler en 3D la reconstitution d'une molaire de la sous-espèce Mammuthus meridionalis depereti.


Cliquer ici pour manipuler en 3D la reconstitution des deux fragments du Trongotherium cuvieri boisviletti.


Cliquer ici pour manipuler en 3D la reconstitution du bois appartenant à Alces carnutorum.


Cliquer ici pour manipuler en 3D la reconstitution de l'humérus de Stephanorhinus etruscus.


Cliquer ici pour manipuler en 3D la reconstitution du bois de Praemegaceros verticornis.